Les Cabinets de Recrutement : La prochaine frontière.

Introduction

Je recrute depuis 20 ans.

C’est une carrière enrichissante mais pleine de défis qui m’a menée de Londres à Singapour et maintenant à Paris.

J’ai eu la chance d’acquérir de nouvelles compétences techniques et de rencontrer des personnes fascinantes dans le monde entier.

Au cours de cette période, les stratégies marketing traditionnelles des cabinets de recrutement (appels à froid, prospection, brochures) ont évolué vers des présentations Tik tok et des campagnes de marketing viral. Le monde du travail et le mode de vie se chevauchent de plus en plus.

Nous vivons à une époque de modernisation rapide, avec des attitudes changeantes à l’égard de l’environnement de travail (bureau et télétravail), de la formation et du bien-être de l’équipe.

La sélection des candidats est passée des techniques d’entretien traditionnelles à des évaluations basées sur les sciences du comportement et soutenues par l’intelligence artificielle.

Alors, la voix du cabinet de recrutement pourra-t-elle encore être entendue en 2024 ?

Le secteur du recrutement aujourd’hui

En 2023, le secteur mondial du recrutement était estimé à 756 milliards de dollars et devrait atteindre plus de 2 000 milliards de dollars d’ici à 2031.

Parmi ces chiffres, une vingtaine de marques sont de véritables multinationales. Il s’agit notamment de Randstad , Pays-Bas (24,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires), Adecco , Suisse (24 milliards d’euros de chiffre d’affaires), Recruit Holdings Co., Ltd. , Japon (23,6 milliards de dollars), ManpowerGroup , États-Unis (19,6 milliards de dollars de chiffre d’affaires), Allegis Group , États-Unis (13,4 milliards de dollars de chiffre d’affaires), Hays , Royaume-Uni (7,6 milliards de livres sterling) et Robert Half, États-Unis (7,4 milliards de dollars de chiffre d’affaires).

Les États-Unis constituent le marché le plus important, contribuant à hauteur de 190 milliards de dollars au chiffre global. Le Canada, représente une valeur de 10,2 milliards de dollars.

En Europe, les deux plus grands marchés sont le Royaume-Uni, l’Allemagne et La France. Selon la REC (Recruitment and Employment Confederation), le secteur du recrutement au Royaume-Uni a contribué à hauteur de 42,9 milliards de livres sterling à la valeur ajoutée brute de l’économie britannique. La France et l’Allemagne ont des valeurs de marché similaires, de l’ordre de 32 à 33 milliards d’euros. La majeure partie de cette valeur provient du secteur de l’intérim.

Le Japon est le plus grand marché de la région Asie-Pacifique avec une valeur de 67,5 milliards de dollars, l’Australie arrive en deuxième position avec une valeur de 20,3 milliards de dollars, l’Inde en troisième position avec 18 milliards de dollars et la Chine en quatrième position avec 3,3 milliards de dollars*.

*Les données référencées concernent le recrutement « en ligne », ce qui signifie que le marché pourrait être beaucoup plus important.

Les défis des agences de recrutement

Automation et l’application de IA

L’application de l’IA dans un processus de recrutement est omniprésente, depuis les « recherches par mots clés » dans les bases de données jusqu’à l’utilisation de ChatGPT dans la rédaction des descriptions de poste et les réponses automatisées des candidats via les chatbots. Pour une pratique alignée sur les ressources humaines, nous éliminons peu à peu l’« humain » de l’équation.

Ces solutions ne rendront pas nécessairement un processus de recrutement plus efficace, ne permettront pas d’économiser de l’argent ou n’apporteront pas de valeur ajoutée aux actionnaires à moyen ou long terme.

L’intelligence artificielle est à la fois basée sur des algorithmes et générative. La précision de cette dernière est très discutable. L’IA générative récupère des données à partir de toutes les sources disponibles sur le web. En ouvrant un mur de données aussi colossal, nous réduisons à la fois la précision et la logique. Sa précision et son facteur de confiance peuvent également être remis en question. OpenAI, le créateur de ChatGPT, bénéficie d’une participation et d’un investissement importants de la part de Microsoft. Il ne s’agit plus d’une organisation à but non lucratif (Opensource) et il y a inévitablement un agenda d’entreprise.

Étant donné qu’il s’agit d’une technologie émergente, il y a lieu de s’interroger sur les entreprises qui dépendent entièrement de cette méthode pour trouver des candidats.

De solides compétences techniques et sociales sont essentielles à la success d’une entreprise. L’incapacité à identifier ces qualités ou de le faire avec imprécision entraîne des licenciements et des ruptures conventionnelles, ce qui crée un trou dans les effectifs, des coûts importants, du stress et une détérioration du moral de l’équipe.

La solution consiste à faire confiance à une forme de recrutement plus « analogique », telle que les cabinets de recrutement. Il est en fin de compte plus rentable.

La plupart des recruteurs rencontreront les candidats en personne au moins une fois pour un entretien professionnel. Les recruteurs plus expérimentés peuvent choisir de le faire dans un cadre plus détendu, afin de mieux comprendre les motivations professionnelles et personnelles. Un bon recruteur fera preuve d’empathie et de discrétion avec son candidat. Il le placera dans un scénario du monde réel. Le candidat lui fait confiance pour gérer sa carrière. Serions-nous à l’aise de faire cela avec un chatbot, dont nous n’avons absolument aucune idée de la personne qui le contrôle?

RPO (Recruitment Process Outsourcing)

Il s’agit de l’externalisation du processus de recrutement externe d’une entreprise à l’un des groupes de recrutement multinationaux que j’ai mentionnés ci-dessus. Le principe est plus répandu dans les milieux d’affaires anglo-saxons, mais il a commencé à avoir un impact en Suisse, en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et dans les pays nordiques. Les plus grandes banques internationales qui ont développé leurs activités à Paris après le Brexit, opèrent toutes avec un modèle RPO.

Les arguments pour?

  • Le coût. Les RPO promet de faire moins cher qu’une cabinet de recrutement.
  • Le volume. Il peut être efficace pour les programmes destinés aux jeunes diplômés et les fonctions opérationnelles.
  • Coordination. Elle permet de suivre l’évolution des postes vacants, les dépenses externes, les flux de travailleurs d’interim.

Les argument contre

  • Précision : Le système peut échouer pour les recrutements des cadres et des experts. Un recruteur inexpérimenté chez un RPO (ou pire, un filtre d’IA) ne percevra pas les nombreuses nuances techniques ou culturelles liées à l’embauche d’un spécialiste.
  • Expérience du candidat : Les humains veulent travailler avec des humains. Il est possible qu’un candidat n’ait pratiquement aucune interaction humaine tout au long de son processus de recrutement par les RPO.

Pourquoi faire appel à un cabinet de recrutement ?

  1. Contact humain : Nous voulons tous parler à quelqu’un de nos ambitions, de nos engagements financiers, de nos craintes et de nos angoisses. Un consultant en recrutement apporte ce soutien aux candidats et contribuer à réduire le stress et l’anxiété tout au long du processus d’entretien. Pour les clients, un bon recruteur vous fournira des détails sur le style de communication du candidat, son aptitude à travailler en équipe, son potentiel de leadership, ses centres d’intérêt extra-professionnels et ses compétences transférables. Autant de qualités qu’un CV ne permet pas d’identifier.
  2. Perspectives : Nous passons 75 % de notre vie au travail. Il est donc essentiel de faire un choix éclairé sur l’employeur ou l’employé potentiel.
  3. Efficacité : Une campagne de recrutement directe via la page carrière de l’entreprise et un ensemble d’annonceurs externes peut attirer 1 000 candidats. 70 % d’entre eux auront besoin d’un parrainage professionnel. Sur les 30 % restants, la majorité ne répondra pas aux exigences techniques. Il s’agit d’un processus inefficace qui entraîne souvent la perte de candidats pertinents. Une agence de recrutement aide à fournir ce filtre, en identifiant les talents pertinents de manière efficace, ce qui permet aux deux parties d’économiser beaucoup de temps et d’énergie.
  4. Négociation : la véritable force d’un recruteur expérimenté est de parvenir à un accord équitable entre le client et le candidat. Les discussions sur la rémunération, l’évolution de carrière et la responsabilité peuvent s’apparenter à une partie d’échecs. Une mauvaise négociation est l’une des principales raisons de l’échec d’un recrutement.
  5. Objectivité : Travailler avec un recruteur qui investit dans l’expérience du candidat et qui « qualifie » ses candidats en fournissant des informations plus détaillées sur leurs motivations fait une différence significative. Ces pratiques favorisent l’innovation au sein de l’entreprise et la prospérité à long terme

Types des cabinets de recrutement

Il existe trois grands types des cabinets de recrutement.

  1. Cabinet de recrutement généraliste (staffing) – multiples secteurs industriels, tous niveaux, recrutement intérim et permanent. Les multinationales disposent toutes de branches de proximité pour répondre aux besoins de tous les niveaux de l’économie. PROMAN France est un exemple d’entreprise française performante dans ce secteur – 4 000 employés, plus que 900 agences et un chiffre d’affaires de 4 milliards d’euros.
  2. Cabinet de recrutement spécialisé – elles couvrent généralement deux ou trois secteurs d’activité et proposent des solutions de recrutement permanent et/ou intérim. Elles se concentrent généralement sur des professionnels plus expérimentés dans une poignée de disciplines techniques, en fonction de leur taille. Une agence spécialisée couvre à la fois le « recrutement contingent » – honoraires en fonction du succès (date d’entrée en fonction du candidat) ou le « recrutement retenu » – un barème d’honoraires anticipés ou échelonnés avec un engagement exclusif.
  3. Executive Search – uniquement sur la base d’un mandat. Utilisé pour les nominations des cadres qui requièrent une sensibilité maximale. La recherche de candidats s’effectue par le biais d’une chasse de tête et s’accompagne souvent de commentaires très détaillés. Ces informations peuvent être utilisées pour les présentations aux actionnaires et les points de presse.

Choisir une agence de recrutement

Le choix peut être écrasant. Je vous conseille :

Écoutez votre réseau.

Si un ami ou un ancien collègue a eu une excellente expérience avec un recruteur, travaillez avec lui.

Rechercher la cohérence dans les offres d’emploi – comment identifier un spécialiste.

Faites-le via les principales plateformes d’offres d’emploi (Linkedin, Indeed, Glassdoor). Par exemple, si Jean Dupont de Techie Recruitment a 5 offres d’emploi différentes pour « Développeur Java » sur chacune d’entre elles, vous pouvez identifier Jean comme un spécialiste dans son domaine avec un bon réseau de clients. Appelez l’agence et demandez à parler à Jean. Et seulement Jean.

Lisez la section « Perspectives » du site web d’un recruteur.

Vous pouvez rapidement distinguer un recruteur passionné et engagé par le niveau de détail qu’il est prêt à partager sur le marché des talents, le développement de l’industrie, les conditions réglementaires et économiques. De nombreux grands cabinets de recrutement sont coupables d’offrir des informations très limitées (voire inexistantes). Les déclarations à l’emporte-pièce sur « l’adoption de la technologie » ou « les batailles pour les talents » sont paresseuses et génériques. Elles n’apportent rien de neuf ni d’unique au marché. Recherchez des éléments concrets et de la crédibilité.

Faites le tour du marché !

Vous pouvez même le faire en tant que client mystère. Une fois que vous avez sélectionné une poignée d’agences qui vous intéressent, appelez-les pour vous présenter. Vous identifierez rapidement le professionnalisme et l’expertise qui se cachent derrière l’image de marque étincelante.

À propos de moi

J’ai commencé ma carrière en tant que consultant en recrutement à Londres en 2004.

J’ai notamment géré et formé des équipes de recrutement et travaillé de manière indépendante en tant que collaborateur unique. J’ai toujours été un consultant avec une passion pour le développement commercial.

Au cours de ma carrière, j’ai participé à la création d’entreprises à Londres, Singapour et Paris.

Je vis avec ma famille près de Tours, dans la vallée de la Loire. J’ai la double nationalité française et britannique.

Sources d'information

  • Bodescot Anne ‘Tout ce que vous pourrez bientôt savoir sur le salaire de vos collègues sans même avoir à le demander’ Le Figaro Décideurs 11 October 2024.
  • Diard Caroline, Baudoin Emmanuel, Berthey Sylvie – Aide Mémoire Ressources humaines 2022
  • Diment Dmitry ‘Employment & Recruiting Agencies in Canada – Market Research Report 2014 – 2029, IBIS World April 2024
  • Duchamp David et Guery Loris – ‘La Gestion des Ressources Humaines’ – Nathan 2020
  • Forbes Advisor – Recruitment Process Outsourcing : The Ultimate Guide –Cassie Bortoff (Editor) and Belle Wong, JD (Contributor) – May 26th 2023
  • Grand View Research – Recruitment Process Outsourcing Market Size, Share & Trends Analysis Report By Type (On-demand, Enterprise), By Service (On-site, Off-site), By Enterprise Size, By End Use, By Region, And Segment Forecasts, 2023 – 2030. Report ID: GVR-4-68038-971-5
  • Insight Partners ‘India Staffing and Recruitment Market Dynamics and Growth Opportunities’ September 11 2024
  • Lai Lin Thomala ‘Market Size of Online Recruitment Industry in China’ – Statista, Jun 13 2024
  • Le Figaro Décideurs – ‘Près d’un actif français sur deux affirme que son entreprise surveille des salariés’ 11 Avril 2023
  • REC – ‘Recruitment industry contributes £43 billion to UK economy’ REC 30th November 2022
  • Reilly Matilda ‘Employment Placement and Recruitment Services in Australia Market Research Report 2014 – 2029, IBIS World May 2024
  • Staffing Industry Analysis – ‘Germany – Staffing revenue reaches EUR 32,8 billion – December 9th 2022.
  • Statista – Recruitment Industry in the US – Statistics and Facts – Statista Research Department – July 4th 2024